10 février 2012

La campagne « jaunie » d’Eva.


Interviewé hier par le quotidien « 20 Minutes » au sujet de la nouvelle image d’Eva Joly, je profite de ce blog pour apporter quelques éléments supplémentaires de décryptage à propos de la communication de l’actuelle candidate des Verts/Europe Ecologie.

Sur le linéaire des offres politiques, Eva Joly était (ce que j’appelais encore il y a quelques mois) un bon « casting », celui qui allait, par son profil atypique, apporter de la nouveauté et de la fraicheur, toujours attendues au moment de la campagne présidentielle :

- D’abord, à défaut d’être « anti système » (comme tout le monde donc), Eva Joly était, par définition, la candidate hors système, magistrate et non « politique » de profession ;
- Ensuite, Eva Joly avait un franc parler, une franchise de ton et une liberté de parole, aujourd’hui si rares en politique, ce qui faisait d’elle une candidate singulière donc intéressante. Avec elle en effet, la promesse de l’anti-langue de bois couplée à l’envie de bousculer (enfin!) les codes devaient être attendus ;
- Enfin, Eva Joly incarnait (dans un contexte de défiance des politiques et des partis), les valeurs d’éthique, de justice et de transparence, soient des éléments de différenciation forts à mettre en avant.

Pourtant, la campagne présidentielle d’Eva Joly ne prend pas. La candidate écologique peine à rassembler son propre camp autour d’elle, n’intéresse que très peu « le petit monde politico médiatique » et ne crée pas (pour l’heure) de désir et d’intérêt au sein même de l’opinion, pourtant préoccupée des questions environnementales/écologiques.

Alors pourquoi la sauce ne prend pas ? A cela évidemment, il y a des raisons politiques (problème avec le PS/F.Hollande puis son porte-parole, petites phrases mal amenées etc…) mais aussi et surtout des couacs en termes de communication.

- D’abord et en premier lieu, son image. Eva Joly s’est en effet trop enfermée dans son habit de magistrate, cette femme sérieuse, dure et au ton professoral incarnant bien trop souvent la « vérité », le mépris et l’autoritarisme. Ne pas assumer sa féminité (qui est au passage est un point différenciant) est une chose. Rejeter les valeurs (affect, émotion, écoute) qui y sont associées en est une autre. Aujourd’hui, Eva Joly a beau changer de coupe de cheveux et retirer ses lunettes, le mal est fait. Au passage, Eva, garde tes lunettes, c’est ta marque de fabrique. Contente toi juste de les remonter, tu gagnerais en sympathie, crois-moi.

- Ensuite, le décalage entre l’image perçue du parti et celle de la candidate qui le représente. Politiquement/culturellement de gauche, les Verts/Europe Ecologie se retrouvents représenté par une personnalité aux antipodes de ce qu’ont à l’esprit les Français : un parti (avec au passage l’image ancrée d’un Dani Cohn-Bendit) ouvert à la discussion et au monde. Eva Joly paraît au contraire fermée, rigide, un tantinet "réac'".

- Enfin, Eva Joly (rationnelle et pragmatique de toute évidence) ne maîtrise pas les règles de la communication et des médias. Et je ne parle pas là de son accent. Paradoxalement, Eva Joly est trop dans le « vrai », trop dans « l’authenticité » de son personnage. Vraisemblablement trop émotive (= défaut en politique), elle ne se maîtrise pas. Le débat avec E. Besson la renvoie en effet à son côté junior. Hélas, la politique est un jeu, un show le temps des caméras (cf : « Mélenshow »). De toute évidence, Eva n’a pas la culture de la com, des images fortes et des formules chocs pour faire mouche. La faute aussi à son ceux qui l’entourent. Car Messieurs, comme disaient S. Royal, « la communication c’est aussi de la politique ». Préparez donc vos séances de briefing en vue des meetings... car là, il va falloir y croire, un minimum. Belley.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire